
Racontez-nous votre parcours…
J’ai eu une vocation précoce. Pensant au journalisme depuis mes douze ans, j’avais effectué mon stage de 3e chez Bolloré Intermédia et en étais revenue convaincue. Après un bac ES, j’ai donc intégré l’école publique de Journalisme de Tours, avant de poursuivre mon cursus à l’université Galatasaray d’Istanbul. Une suite logique à mon mémoire de fin d’études portant sur l’évolution de la liberté de la presse en Turquie. J’ai en parallèle fait différents stages : Ouest France, ELLE Belgique et National Geographic. C’est à la fin de ce dernier que Jean-Pierre Vrignaud, le rédacteur en chef, m’a fait confiance malgré mon jeune âge (tout juste 20 ans) en m’intégrant dans l’équipe de Traveler.
Un pays qui gagne à être plus connu ?
La Pologne, où l’on navigue sans cesse entre contemplation du passé et renouveau. C’est un pays facilement accessible et très abordable, avec une jeunesse avide d’échanges. J’ai un attachement particulier pour la ville de Cracovie qui, loin de l’image assez terne qu’on a pu lui donner, regorge de bars, de restaurants atypiques (où l’on mange très bien !), de galeries d’art et de boutiques de designers.
Les thématiques qui attisent le plus votre curiosité ?
J’ai un intérêt majeur pour les questions géopolitiques au Moyen-Orient, la condition féminine et les minorités sexuelles. Dans un genre plus léger, je suis aussi très portée sur la gastronomie, car convaincue que cela contribue à la découverte d’un pays ou d’une nouvelle culture. Quant à mes passions, le voyage arrive naturellement en tête, suivi de la danse, que je pratique depuis l’âge de 4 ans.
Vos plus beaux reportages
L’Australie, où j’ai passé deux semaines intenses à la découverte du bush, de sa nature sauvage et de la vibrante Melbourne. La session plongée avec les sea lions en pleine mer est un souvenir que j’aurais du mal à oublier. J’ai aussi battu un record personnel lors de ce reportage : huit avions en cinq jours !
Ou encore l’Iran, pays que j’ai traversé uniquement en dormant chez l’habitant. La meilleure méthode selon moi pour entrer dans l’intimité des locaux et découvrir ce qui se cache derrière les voiles. C’est le voyage qui m’a le plus marqué en termes de relations humaines.
Un conseil à partager aux attachés de presse ?
Ne pas oublier que nous sommes journalistes, et que le confort ne doit donc jamais primer sur la découverte. C’est très agréable, mais loin d’être une priorité ! N’ayez donc pas peur de nous proposer des projets qui “sortent des clous”, même si cela implique des conditions de voyage improbables ou des hébergements hors du commun, voire rustiques.
Votre plus belle interview ?
Ece Ege, créatrice de la marque Dice Kayek, qui m’a reçue chez elle, autour d’abricots secs ramenés de Bursa, sa ville natale (les souvenirs sont intacts). C’était en 2016, en pleine Fashion week d’Istanbul. Nous avons passé près de quatre heures à discuter de son parcours et de sa collection la plus personnelle “Istanbul Contrast”, pour laquelle chaque pièce a été inspirée par l’une des facettes d’Istanbul. Une robe en organza rose pâle pour les loukoums, des broches imposantes en imitation aux joyaux du palais de Topkapi… J’ai été fascinée par cette femme, tant par sa créativité que par sa simplicité.
Présentez-nous une journée type…
Je n’ai pas de journée type, et c’est justement ce qui me plait dans ce métier ! Mais disons qu’il y a deux types de journées : celles où je suis au bureau, avec des horaires assez classiques, et celles où je suis en reportage. Le rythme est alors nettement plus intense : on emmagasine énormément d’informations en peu de temps, on doit toujours être réactif et on dort peu. Cela demande une bonne résistance physique, pas vraiment des vacances comme beaucoup peuvent le penser…
Les valeurs qui vous guident au quotidien ?
La curiosité, si on peut considérer ça comme une valeur. La gentillesse et l’humilité, qui rendent toutes les relations beaucoup plus simples. La rigueur, indispensable à l’écriture d’un bon papier. Et j’espère être autant émerveillée et toujours aussi excitée à l’idée de partir en reportage dans dix ou vingt ans.
L’événement que vous souhaiteriez couvrir avant la fin de votre carrière ?
Étant assez captivée par les cultures alternatives et les nouvelles expériences sociales, j’aimerais couvrir un événement où la population se rassemble en masse autour de belles valeurs, sur le même modèle que le Summer of Love, à San Francisco, pendant l’été 1967.
La personnalité qui vous inspire ?
Priscilla Telmon. Peu connue du grand public, elle incarne parfaitement ma définition de “la vraie aventurière”. À 23 ans, elle avait déjà gravi le Kilimandjaro et traversé l’Atlas à cheval. Preuve en est, s’il en faut, que la valeur n’attend pas le nombre des années.